IFRIC Mai 2021 – Attribution des droits IDR aux années d’ancienneté (màj Nov. 2021)
L’IFRIC (« IFRS Interpretations Committee » ou « Comité d’interprétation des normes IFRS ») a adressé en avril 2021 à l’IAS Board (International Accounting Standards Board), pour décision (approbation ou refus ou position intermédiaire), un « TAD » (« Tentative Agenda Decision » ou « Décision Provisoire ») par lequel il propose de modifier la manière de calculer les engagements relatifs à certains régimes à prestations définies[1].
L’IAS Board a validé cette position début juin 2021 tout en précisant qu’il n’y avait pas lieu de modifier quoique ce soit dans la norme IAS 19 qui permet déjà cette interprétation.
Il restait un certain nombre d’incertitude quant aux modalités d’application de cette position. Les Commissaires aux Comptes ont trouvé un consensus fin septembre, qui lève ces incertitudes.
Sommaire:
Contexte
Les plans concernés : à travers un exemple précis, sont visés les plans pour lesquels :
- L’attribution de droits est conditionnée par la présence dans l’entreprise au moment du départ en retraite (avec perte de tout droit en cas de départ anticipé),
- Les droits dépendent de l’ancienneté, mais sont plafonnés à partir d’un certain nombre d’années d’ancienneté, le plafond intervenant, au moins pour certains salariés, largement avant le départ à la retraite.
Selon les méthodes proposées à ce jour par la norme IAS 19 pour le calcul des engagements, les droits sont considérés attribués :
- Méthode 1 : Selon la formule du régime : l’engagement à une date donnée correspondant aux droits acquis par le salarié en fonction de son ancienneté à date ;
- Méthode 2 : De manière linéaire sur la carrière du salarié dans l’entreprise[2]: l’engagement correspond alors à un prorata des droits acquis par le salarié au moment de son départ à la retraite ; le prorata étant égal au ratio Ancienneté passée au calcul / Ancienneté totale projetée au départ.
Depuis plusieurs années il y a un consensus en France pour l’application de la méthode 2, même si, dans certains cas, et en accord avec les CAC, la méthode 1 est retenue.
Par sa nouvelle position (Méthode 3), l’IFRIC considère que, à partir du moment où, d’une part, aucun droit n’est acquis en cas de départ avant l’âge de la retraite et, d’autre part, les droits plafonnent après un certain nombre d’années d’ancienneté (N), ce seraient les N dernières années de carrière du salarié dans l’entreprise qui lui confèrent les droits au moment du départ (cf. exemples 1 & 2).
Par ailleurs, selon le consensus trouvé par les Commissaires aux comptes, il y a également lieu de modifier la méthode d’évaluation pour les conventions dont les droits sont définis par tranche d’ancienneté. En effet, ils considèrent que, compte tenu du fait que les droits sont définis par palier, un certain nombre des années de service effectué par un salarié donné ne donne pas lieu à attribution de droits (exemple d’un salarié qui partirait avec une ancienneté de 27 ans pour une convention qui attribue 2 mois après 20 ans et 3 mois après 30 ans. Ce salarié aura atteint le maximum de droits après 20 ans d’ancienneté, il y a donc 7 années de service qui ne donnent pas lieu à attribution de droits). Il convient alors, pour l’évaluation, de linéariser les droits sur les N dernières années, N représentant le nombre d’années qui donne lieu à l’attribution de droits et donc le dernier palier que le salarié atteindra au moment de son départ en retraite (dans notre exemple les 20 dernières années. Pendant les 7 premières années il n’y aura donc ni engagement ni coût des services).
Sont donc notamment concernées :
- Les conventions qui prévoient des droits définis par paliers d’ancienneté, qu’il y ait ou non un plafond absolu d’ancienneté (Ex : Métallurgie ; Chimie)
- Les conventions qui prévoient des droits attribués de manière progressive année après année mais qui prévoient un plafond d’ancienneté pris en compte (Ex : Industrie pharmaceutique, Commerce de gros-Cadres et Employés/Ouvriers…)
Les seules conventions qui ne sont pas concernées sont :
- Celles dont les droits dépendent de l’ancienneté mais qui ne prévoient pas de plafond pour le nombre d’année d’ancienneté prises en compte (Ex : Syntec, Compagnies d’assurance)
- Celles qui prévoient des droits qui ne dépendent pas de l’ancienneté (Ex : Pétrole)
Conséquences : Cette nouvelle méthode aura les conséquences suivantes :
- Baisse des engagements. L’impact de la baisse des engagements devrait être constaté par les capitaux propres (Réserves et pas par OCI comme les écarts actuariels),
- Baisse proportionnelle du coût d’actualisation (coût financier) qui passe par le compte de résultats,
- Hausse potentielle du coût des services : La conséquence de la baisse des engagements est potentiellement la hausse des coûts des services futurs (pour atteindre la même indemnité au moment du départ à la retraite) qui sont comptabilisés par le compte de résultats. En fonction de la structure démographique de la société et de la structure des droits, la hausse des coûts des services peut ne pas être immédiate.
Première application et délais de mise en œuvre :
- La mise en œuvre des changements requis par cette décision doit être réalisée dès que possible (et donc dans la mesure du possible, pour la clôture du 31/12/2021).
- Il s’agit d’une application rétrospective (changement de méthode) et donc l’impact se porte en report à nouveau au 1/1/N-1 (et non en OCI comme un écart actuariel).
- L’application aux cas des concernés aura pour effets une augmentation des capitaux propres au 1/1/N-1 et une augmentation prospective des charges de personnel.
Autres points importants :
- Cette position ne serait pas applicable pour les autres normes internationales, notamment pour les normes américaines (US GAAP) et les normes allemandes (BilMoG) ;
- Concernant les normes françaises (recommandations de l’ANC): L’ANC a rendu son avis le 5 novembre 2021, en adaptant la recommandation n° 2013-02 du 7 novembre 2013. Le détail de cette décision se trouve dans l’article SPAC ICI.
- Cette modification de méthode rend plus sensible l’hypothèse d’âge de départ à la retraite qu’il conviendra peut-être de modifier pour la rendre plus proche de la réalité et des perspectives d’évolution.
Nous fournissons ci-après quelques exemples dans des cas (CCN et ancienneté au départ) pour lesquels les trois méthodes donneraient des résultats plus ou moins différents.
Exemples
- Exemple 1 : CCN de l’industrie pharmaceutique (Indemnité de départ à la retraite = 3/10ème de mois de salaire par année d’ancienneté, à partir de 3 ans d’ancienneté et avec un plafond à 9 mois, correspondant à une ancienneté de 30 ans)
Pour une personne qui entre dans l’entreprise à 22 ans et qui part en retraite à 62 ans, les droits évalués pour les engagements seraient de :
Ancienneté au calcul | Méthode 1 | Méthode 2 | Méthode 3 |
5 ans | 1,50 | 1,13 | – |
10 ans | 3,00 | 2,25 | – |
15 ans | 4,50 | 3,38 | 1,50 |
20 ans | 6,00 | 4,50 | 3,00 |
25 ans | 7,50 | 5,63 | 4,50 |
30 ans | 9,00 | 6,75 | 6,00 |
35 ans | 9,00 | 7,88 | 7,50 |
40 ans | 9,00 | 9,00 | 9,00 |
- Exemple 2 : CCN des journalistes (Indemnité de départ à la retraite = 1 mois de salaire après 2 ans d’ancienneté, 2 mois après 5 ans, 3 mois après 10 ans, 4 mois après 20 ans et 5 mois à partir de 30 ans d’ancienneté)
Pour une personne qui entre dans l’entreprise à 22 ans et qui part en retraite à 62 ans, les droits évalués pour les engagements seraient de :
Ancienneté au calcul | Méthode 1 | Méthode 2 | Méthode 3 |
5 ans | 2,00 | 0,63 | – |
10 ans | 3,00 | 1,25 | – |
15 ans | 3,00 | 1,88 | 0,87 |
20 ans | 4,00 | 2,50 | 1,67 |
25 ans | 4,00 | 3,13 | 2,50 |
30 ans | 5,00 | 3,75 | 3,33 |
35 ans | 5,00 | 4,38 | 4,17 |
40 ans | 5,00 | 5,00 | 5,00 |
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[1] Les interprétations IFRIC sont rédigées par l’IFRS Interpretations Committee (auparavant le Comité d’interprétation des Normes internationales d’information financière, IFRIC) et sont publiées après avoir été approuvées par l’International Accounting Standards Board (IASB).
[2] En théorie, sur la durée d’acquisition des droits (jusqu’à l’ancienneté qui confère les droits maximum). Toutefois, compte tenu du fait que les droits sont conditionnés par la présence dans l’entreprise au moment du départ en retraite, la pratique en France est, depuis de nombreuses années, d’étaler les droits sur toute la carrière dans l’entreprise.